Alimentation et écoulement des nappes

Sommaire de l’article :

  1. Alimentation des nappes d’eau souterraine
  2. Écoulement de l’eau vers la nappe
  3. Circulation de l’eau dans la nappe souterraines
  4. Exutoires naturels des nappes
  5. Pompages en nappe
  6. Loi de Darcy et perméabilité : vitesse d’écoulement de la nappe
  7. Porosité cinématique et vitesse réelle des écoulements souterrains
  8. Transmissivité et coefficient d’emmagasinement

Alimentation des nappes d’eau souterraine

Les nappes libres sont principalement alimentées par l’infiltration d’une partie des eaux de pluie qui, compte tenu de l’évapotranspiration, sont surtout efficaces entre les mois d’octobre et d’avril, quand la végétation consomme peu d’eau. Cependant, dans les aquifères très fissurés, les épisodes pluvieux des mois de printemps et d’été peuvent recharger momentanément les réservoirs aquifères.

La fraction des eaux de pluie qui n’est pas captée par la végétation pour l’évapotranspiration s’appelle pluie efficace. En fonction de la pente topographique, de la nature du sol mais aussi de l’intensité de la pluie, celle-ci se répartit ensuite entre ruissellement superficiel et infiltration vers la nappe.

La recharge par les pluies provoque la remontée des niveaux des nappes (A) et l’augmentation saisonnière du débit des sources (B) (J.-J. Collin © 2004, modifié 2015)

Écoulement de l’eau vers la nappe

L’écoulement vertical de l’eau vers la nappe est fonction de la porosité et de la perméabilité du sol, et de la nature et l’épaisseur de la zone non saturée.
La vitesse d’infiltration peut être de l’ordre du mètre par an (Craie de Champagne), d’un mètre par mois (Calcaire de Beauce), d’un mètre par jour (alluvions), et de plusieurs dizaines de mètres à l’heure dans les terrains très fissurés de type karstique  .

La capacité des sols à l’infiltration peut être estimée de manière cartographique, notamment d’après l’étude de la densité des réseaux hydrographiques. Cette carte IDPR (Indice de développement et de persistance des réseaux) est consultable dans l’espace cartographique.

Circulation de l’eau dans la nappe souterraine

La surface de la nappe est appelée niveau piézométrique   ou charge hydraulique. Elle est mesurée en relevant le niveau d’eau dans les puits et piézomètres, ou le niveau topographique à l’emplacement d’une source (qui correspond à une résurgence de la nappe).
Entre la zone d’infiltration et l’exutoire, l’eau souterraine se déplace dans l’aquifère par gravité, soit des zones les plus hautes vers les points les plus bas. La surface de la nappe est donc en pente.
Cette pente est appelée gradient hydraulique (grad h) et peut être calculée entre deux points de la même manière qu’une pente topographique : en divisant la différence de niveau de la nappe entre les deux points par la distance les séparant.
En mesurant le niveau piézométrique   en plusieurs points, on peut déterminer le sens d’écoulement de la nappe et tracer une carte piézométrique  .

Exemple de carte piézométrique avec les sens d’écoulement (© J.-J. Collin, Les eaux souterraines)

Exutoires naturels des nappes

Les sorties de la nappe s’observent quand le niveau piézométrique   devient égal à l’altitude topographique. Si les entrées dans la nappe sont pratiquement généralisées à toute la surface des nappes libres, les sorties s’opèrent surtout le long de lignes : lignes de sources plus ou moins continues, lignes de contact entre deux terrains aux propriétés différentes, rivages maritimes, zones de marais.
Enfin, les berges et les lits des cours d’eau qui drainent les nappes tout au long de leur trajet sont les lieux de sortie les plus importants des eaux souterraines : même en l’absence de pluies et de ruissellements de surface, le débit des rivières augmente d’amont en aval, entretenu par les nappes.

Types de sources en nappe libre (© J.-J. Collin, Les eaux souterraines)

Pompages en nappe

En créant des « points bas » artificiels, c’est-à-dire en puisant de l’eau grâce à des forages et des puits, on appelle l’eau des nappes dans les zones entourant les ouvrages.
Le pompage crée une zone de dépression, on parle donc de cône de dépression ou de rabattement autour de l’ouvrage de captage. Ce cône est caractérisé par son extension ou zone d’influence du pompage et par l’ampleur du rabattement du niveau piézométrique   induit.

Le rabattement du niveau de la nappe ne survient pas instantanément. Le phénomène de creusement du cône est progressif et, à pompage constant, ralentit jusqu’à obtenir une stabilisation du rabattement. De la même façon, lorsque le pompage est interrompu, le niveau piézométrique   remonte progressivement dans le forage et autour de celui-ci.

Le rabattement et la zone d’influence varient en fonction des paramètres hydrodynamiques, du débit et du temps de pompage. Pour un aquifère donné, le cône de rabattement est d’autant plus creusé que le débit prélevé est important. En revanche, pour un débit donné, le cône est d’autant moins profond que la perméabilité de l’aquifère est forte.

Selon la nature du terrain (perméabilité) et le débit pompé, le cône de rabattement des forages est plus ou moins vaste et creusé. (© J.-J. Collin, 2004, Les eaux souterraines)

Loi de Darcy et perméabilité : vitesse d’écoulement de la nappe

La vitesse d’écoulement de la nappe est liée au gradient hydraulique et à la perméabilité de l’aquifère. Celle-ci se définit comme la faculté de la roche à se laisser traverser plus ou moins facilement par l’eau.

La perméabilité des roches a été étudiée par le savant dijonnais Henry Darcy. En 1856, il établit expérimentalement en mesurant le débit d’eau s’écoulant à travers un massif de sable que « le volume débité est proportionnel à la charge et en raison inverse de l’épaisseur de la couche traversée ».
Le rapport entre la charge ou différence de niveau d’eau et l’épaisseur de la couche traversée correspond au gradient hydraulique.
La constante de proportionnalité, qui dépend du milieu poreux, a été baptisée perméabilité ou coefficient de Darcy (K).
En divisant le débit par la section du massif sableux, on obtient une vitesse fictive du fluide à la sortie du massif. Cette vitesse est appelée vitesse de filtration ou vitesse de Darcy (U) et correspond à la vitesse d’écoulement de la nappe.

La loi de Darcy peut donc se résumer ainsi : U = K . grad h .

Le gradient hydraulique étant sans unité, la perméabilité a la dimension d’une vitesse et s’exprime donc en mètres par seconde. Comme les valeurs sont généralement très faibles, on utilise le système des puissances de 10 : ainsi 10-3 m/s correspondent à une vitesse de 1 mm/s, soit 86,4 m/j.

Porosité cinématique et vitesse réelle des écoulements souterrains

La vitesse de Darcy peut être assimilée à une vitesse fictive : on considère que l’écoulement se produit au travers d’une section de terrain où roche et pores sont pris en compte globalement, comme si toute la section était traversée. En réalité, comme l’eau ne passe que par les pores, la vitesse dans les interstices est plus importante que celle, fictive, issue du calcul effectué selon la loi de Darcy, au travers de toute la section de terrain, grains de roche et pores compris.

L’ensemble des vides disponibles pour l’écoulement est appelé porosité cinématique (wc). Celle-ci diffère de la porosité totale parce qu’une partie de l’eau est liée aux grains de la roche par des forces de capillarité, mais aussi parce que tous les pores ne sont pas connectés entre eux : certains sont isolés à l’intérieur des grains de la roche et l’eau contenue dans ces vides ne peut donc pas circuler.

La vitesse réelle de l’eau dans la nappe (V) peut donc se calculer en divisant la vitesse de Darcy par la porosité cinématique : V = U / wc .

Transmissivité et coefficient d’emmagasinement

L’épaisseur de la couche géologique contenant la nappe joue un rôle dans son comportement. Le paramètre appelé transmissivité décrit la capacité d’une formation géologique à se laisser traverser par un écoulement. La transmissivité T d’une couche est donc le produit de la perméabilité moyenne Km par l’épaisseur e de la couche : T = Km . e .

Exemples de variabilité des temps d’écoulement des eaux souterraines selon les caractéristiques physiques de l’aquifère (© Les eaux souterraines en France, BRGM Éditions, adapté de C. Drogue, 1971)

Suivant la porosité de la roche, seulement une partie de l’eau est récupérable par pompage. Le coefficient d’emmagasinement (S) décrit une quantité d’eau récupérable et disponible dans l’aquifère. L’eau piégée et bloquée dans la roche n’est pas récupérable par les pompages.
En nappe libre, le coefficient d’emmagasinement est assimilable à la porosité de drainage, correspondant à un pourcentage : le volume d’eau mobilisable divisé par le volume du terrain.
En nappe captive, la définition du coefficient d’emmagasinement est moins intuitive car l’eau est sous pression : l’eau qui peut être libérée ne provient pas de la vidange des pores mais de la décompression de la roche et de l’eau contenue dans ceux-ci.

La perméabilité, la transmissivité et le coefficient d’emmagasinement sont des paramètres hydrodynamiques. Les paramètres hydrodynamiques sont calculés à partir de l’interprétation des pompages d’essai. Ils sont consultables dans les caractéristiques hydrodynamiques des fiches descriptives BSS Eau des points d’eau.

Bibliographie

  • Aquifères et eaux souterraines en France, Ouvrage collectif sous la direction de Jean-Claude Roux, BRGM Éditions, 2006.
  • Les eaux souterraines, connaissance et gestion, Jean-Jacques Collin, BRGM Éditions et Hermann, 2004.
  • Les eaux souterraines en France, Collection Les enjeux des Géosciences, BRGM Éditions, 2009.

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